Point de gestion du mois de février

Point de gestion du mois de février

Il était une fois dans l’Est

Les marchés sur la ligne de front géopolitique.

Les jours passent et la guerre en Ukraine se poursuit. Les investisseurs ont compris que le conflit ne s’arrêterait pas et les marchés continuent leur baisse en accélérant. Le message est clair, Poutine ne souhaite pas de cessez-le-feu et entend bien dérouler son plan de conquête de l’Ukraine.

Les risques économiques sont relativement simples : une flambée des prix des matières premières entraînant une inflation et de surcroît un ralentissement de la croissance. Certains économistes dans ce contexte abordent déjà le terme de stagflation (qui n’existe pas au passage…). C’est un scénario de récession accompagné d’une inflation forte. C’est le scénario du pire, sans doute auto-alimenté par le contexte qui ne laisse pas entrevoir pour le moment des lendemains qui chantent…

Nous n’adhérons pour l’instant pas à cette thèse. D’une part, il faudrait que les prix de l’énergie soient bien plus élevés et de manière durable pour entraîner une récession. Les prix étant très volatils, ils peuvent monter très fortement et redescendre très vite dans de courtes périodes. Le danger survient si les prix restent anormalement élevés pendant longtemps.

D’autre part, la croissance reste présente, les publications de résultats qui s’achèvent nous montrent qu’une large majorité des entreprises cotées ont des résultats au-dessus du consensus, et ce malgré le contexte inflationniste.

Enfin, vous aurez constaté que la guerre en Ukraine nous aura guéris médiatiquement du COVID. Les mesures de restrictions sont levées progressivement partout dans le monde. Cela devrait soutenir l’activité et la consommation.

Le jour d’après ?

L’analyse à chaud de la situation nous parait trop délicate et incertaine pour fonder un scénario pertinent. Les données changent trop vite. C’est pourquoi nous allons plutôt essayer de prendre de la hauteur sur les évènements et émettre des hypothèses sur les conséquences de ce conflit.

J’ai été très marqué et surpris par la réaction collégiale et consensuelle des pays occidentaux face à l’invasion russe. La réponse des sanctions économiques et l’unité dans le discours laissent entrevoir un sursaut de l’Europe. Par son agression, la Russie a-t-elle réveillé la vieille endormie ?

Nous constatons que les crises sont des accélérateurs de tendances. Souvenez-vous, le COVID a accéléré la transition digitale des états et des entreprises, des modes de vie, du télétravail et même du rapport au travail.

La guerre aux portes de l’Europe fait l’objet d’un catalyseur extrêmement puissant pour accélérer la cohésion et la conduite des chantiers européens. C’est un tournant majeur, les pays européens ne souhaitent plus dépendre à 40% comme l’Allemagne par exemple des exportations de gaz d’un pays instable politiquement. De la même manière que nous ne voulons plus dépendre intégralement de l’Asie pour la fabrication des masques ou des semi-conducteurs pour fabriquer nos voitures.

Plus important encore, l’Europe se rend compte qu’elle n’a pas d’armée ni de coordination pour défendre ses États membres.

Nous devrions assister à des investissements massifs dans les années à venir pour financer plusieurs thèmes :

  • La défense sera l’enjeu prioritaire. L’Allemagne a annoncé la création d’un fonds spécial de 100 milliards d’euros pour renforcer son armée. La France devrait augmenter son budget de 3 milliards par an à compter de 2023. Les marchés baissent de 18% depuis le point haut de début d’année alors que Thales progresse de 45% ! L’Europe de la défense est peut-être en train de se bâtir…
  • La transition énergétique pour laquelle tout le monde semblait traîner les pieds devrait accélérer. Plus personne ne veut des énergies fossiles comme moteur principal. On cherchait il y a peu comment faire la transition ? on se demande plutôt maintenant quand ?
  • Les semi-conducteurs et les technologies sont des enjeux majeurs de la prochaine décennie. L’Europe ne souhaite plus dépendre des serveurs et technologies américaines pour ses infrastructures ni des chaînes de production asiatiques sur les secteurs clefs.

Ces transformations ont un coût. D’une part celui d’une inflation plus élevée que celle que nous avons connue ces vingt dernières années. D’autre part, les investissements massifs nécessitent des taux réels durablement bas voire négatifs. Pour rappel le taux réel est taux nominal auquel on soustrait l’inflation.

Quelle conclusion ?

Si les taux doivent rester bas et que les investissements doivent être massifs, il faut rester sur les marchés actions. C’est bien dans les actifs risqués que se joueront les enjeux de demain.

Banques centrales, une équation à trois inconnues.

Dans notre newsletter précédente, nous précisions que les banquiers centraux étaient pris au piège. L’arbitrage entre lutte contre l’inflation et préservation de la croissance était délicat. Ils peuvent désormais ajouter dans la balance la crise géopolitique…

Soit ils augmentent les taux, ce qui freinera la croissance et réduira l’inflation.

Soit ils laissent filer l’inflation pour préserver la croissance.

Il faut maintenant composer avec les chars de Poutine lancés en Ukraine à vive allure. L’inflation par conséquent va continuer d’augmenter. Parallèlement, le conflit va contrarier la croissance en Europe en impactant les entreprises qui avaient des activités en Russie… Rappelons que bien que fermée depuis une semaine, la Bourse de Moscou a perdu presque 90% (non il n’y a pas d’erreur de frappe) depuis le début du conflit en se basant sur les cours des produits dérivés. Même si elles n’arrêtent pas (encore) le conflit armé, les sanctions font assez mal à l’économie russe !

Que faire ?

Le premier moteur de croissance dans nos économies : c’est vous chers amis; à savoir la consommation des ménages. Une inflation trop forte viendrait ralentir la consommation et par conséquent freiner la croissance également. En respectant cette logique, nos banquiers centraux vont donc probablement choisir de lutter contre l’inflation en remontant les taux. Ils le feront sans doute avec plus de retenue en essayant de gagner du temps sur l’issue du conflit et le désengorgement des chaînes d’approvisionnement.

Une chose est certaine, la lecture macroéconomique qui est déjà une science inexacte par temps calme devient périlleuse par vent d’Est…

Tactique d’allocation :

Céder aux sirènes de panique serait une erreur de notre point de vue. Lorsqu’on investit à long terme en s’exposant en bourse, l’échéance est de plusieurs années. Il faut accepter la volatilité et les périodes de baisse.

Acheter au son du canon fait sens. Si vous détenez des liquidités, il est intéressant de les utiliser très progressivement pour investir dans les périodes de crise. Nous ne savons pas si le point bas est proche d’être atteint. Nous savons en revanche que vous payez des actifs 18% moins chers qu’en début d’année… Une baisse des marchés de 20% commence à constituer un point d’entrée intéressant à regarder.

L’or et l’exposition aux matières premières permettent d’amortir la baisse. Nous avons renforcé cette thématique dans les portefeuilles assurance vie.