Point de gestion du mois d’aout

Point de gestion du mois d’aout

De l’eau dans le gaz

Le contexte

Les mois s’enchaînent et se ressemblent. En reprenant mes points du contexte du mois précédent, je m’aperçois que pas grand-chose n’a évolué.

  • L’activité économique se dégrade de plus en plus.
  • L’Europe prend conscience de sa crise énergétique.
  • Les actions rechutent après le rebond du mois de juillet.
  • Les taux poursuivent leurs remontées.

Une récession inévitable ?

Le scénario d’une récession qui n’était pas notre thèse principale en ce début d’année, semble se concrétiser chaque jour un peu plus. L’activité en Europe, aux États-Unis et en Chine, ralentit très fortement. Il est intéressant de retenir que les causes ne sont pas les mêmes dans chacune des zones du monde. Dès lors, la crise dans son ampleur et sa durée ainsi que la sortie de crise ne seront pas les mêmes.

Aux États-Unis le ralentissement économique est un cas d’école de manuel :

La première vague de canicule a dû faire surchauffer les cerveaux des investisseurs. Après les ventes massives d’actifs risqués en juin, le mois de juillet a permis un rebond des bourses. Il fallait bien reprendre un peu d’air lorsque les idées se sont remises en place. Les publications des résultats des grandes eUne stimulation très forte de l’économie post covid avec les plans de relance et de l’argent magique. Cela a entraîné un excès de demande. En parallèle l’offre a du mal à suivre avec des pénuries d’approvisionnement. L’économie est en surchauffe, l’inflation s’installe et commence à se propager dans les salaires. La banque centrale doit donc monter les taux rapidement et fortement pour éteindre l’incendie et ralentir la machine. C’est simple et basique. Cela devrait fonctionner et comme toujours les États-Unis sortiront les premiers du marasme en cours. Les marchés financiers en ont bien conscience, la preuve en est, le dollar est au plus haut depuis 20 ans face aux paniers des principales devises. Quand tout part en vrille, il vaut mieux détenir vos actifs en dollars qu’en euro, livres, pesos ou même bitcoin…

En Europe, nous connaissons une crise énergétique :

Vous avez souvenir de la crise de 2008 qui était une crise immobilière. Elle a donné suite en 2010 à la crise des dettes souveraines avec la Grèce en quasi-faillite. Nous avons eu ensuite la crise sanitaire mondiale en 2020. Nous sommes en 2022 et l’Europe prend conscience de la crise énergétique qu’elle subit. Les grandes crises ont toujours un élément déclencheur qui vient enrayer totalement le fonctionnement normal d’une économie.

L’inflation en zone euro a une composante qui dépend pour la majorité de la flambée des prix de l’énergie. En parallèle de ça, les économies ralentissent. La marge de manœuvre de la banque centrale est donc délicate, car :

  • En augmentant les taux, elle va accentuer le ralentissement économique sans une grande influence sur l’inflation.
  • En restant inactive, elle laisse l’inflation se poursuivre et ne remplit plus son mandat d’assurer la stabilité des prix.

En réalité, elle va certainement augmenter les taux de manière assez rapide afin de sauver la devise euro. En effet, comme les matières premières se paient en dollars, l’affaiblissement de la devise génère une inflation importée.

Prenez le pétrole, il se paie en dollars. Les prix flambent et l’euro à perdu 14% face au dollar depuis le début de l’année. Nous subissons donc un double effet ciseau : hausse du prix et baisse de la valeur de notre monnaie. Avec votre même euro, vous achetez 14% de pétrole de moins qu’en début d’année… En réalité vous en avez même beaucoup moins, car son prix est passé de 80$ en janvier à 90-100$ aujourd’hui.

La salvation en zone euro viendra plutôt d’une accalmie sur le conflit en Ukraine. C’est aujourd’hui l’épicentre de nombreux problèmes.

La Chine quant à elle vit dans un « monde parallèle » pour reprendre l’expression citée il y a peu dans les Échos :

Si pour vous les boîtes de masques sont rangées dans un placard avec vos boîtes de Kleenex pour l’hiver et un ou deux autotests bientôt périmés ; la Chine est dans une matrice tout autre.

La ville de Chengdu (21 millions d’habitants) vient d’être reconfinée pour 140 cas de contamination détectés… La ville de Shenzhen qui est un peu la Silicon Valley chinoise connaît des restrictions sanitaires sévères également. Les confinements n’ont rien à voir avec ce que nous avons connu en France : interdiction de sortir de chez soi et même d’ouvrir la porte (uniquement pour la livraison de nourriture) ; interdiction de parler à vos voisins ; dépistage quotidien à réaliser…

La politique du zéro covid qui semble incompréhensible à nos yeux se poursuit et empêche tout redémarrage de l’économie. Ajoutez à cela une crise immobilière avec des faillites de promoteurs et vous aurez une situation qui ne fait pas plus envie que la nôtre.

Le malheur chinois nous évite cependant le coup de grâce en Europe. En effet, le ralentissement économique et les confinements réduisent drastiquement la demande de pétrole chinois. Cela nous protège d’une explosion du prix du baril bien au-delà des 100 $.

Enfin, pour garder l’espoir dans nos convictions sur la Chine, le pays ne connaît pas ou peu d’inflation et la banque centrale ainsi que le gouvernement disposent de marges de manœuvre pour stimuler la reprise de la croissance lorsqu’ils le décideront.

Captain America à la rescousse ?

Nous aimons bien essayer de nous projeter et de voir le verre à moitié plein. La situation est certes très dégradée, mais essayons de voir une des clefs de sortie de crise.

Si les Américains avaient la possibilité de siffler la fin de la partie et le retour à la normale ?

C’est un peu le scénario qui commence à se dessiner dans la presse anglo-saxonne.

Poutine a déclenché la guerre en Ukraine sur fond de peur d’expansion de l’OTAN. Cependant, l’agressivité russe n’a eu pour effet que de renforcer encore un peu plus l’organisation atlantique avec des pays neutres comme la Finlande ou la Suède qui ont demandé en urgence le ralliement à l’OTAN. L’influence américaine en Europe approche donc son apogée.

Le conflit a également relancé les budgets de défenses des États qui iront pour beaucoup (l’Allemagne avec sa commande récente d’avions de combat par exemple) s’approvisionner auprès d’entreprises américaines.

Militairement, la Russie ennemie de toujours des États-Unis est affaiblie. On voit, le conflit peine à évoluer de manière franche en faveur de Poutine.

Enfin, si la Russie rencontre autant de difficultés sur le terrain, c’est indéniablement grâce au soutien militaire fourni par les Américains. Croyez bien que toute la bravoure des soldats ukrainiens aurait déjà volé en éclat sans l’apport massif de moyens financiers, d’équipements de dernière génération et d’armements pour repousser les offensives russes.

L’inflation qui tend à s’installer et à mettre en péril l’économie américaine pourrait pousser les États-Unis à stopper les livraisons d’armes auprès de l’Ukraine. L’idée d’accepter un cessez-le-feu avec des négociations pourrait émerger. Les Américains ont atteint un certain nombre d’objectifs, ils pourraient désormais œuvrer à une désescalade en sous-main.

L’avenir nous en dira plus mais cela reste passionnant.

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