Lettre du mois de février
Points importants :
- L’inflation fait de la résistance.
- La récession la plus annoncée de l’histoire n’arrive pas.
- La Chine peine à se réveiller ?!
- Les gérants sont sous-investis.
Le contexte
Il est parfois difficile de commenter les marchés et les actifs financiers tous les mois, car les scénarios ne s’inversent pas au rythme des commentateurs. L’exercice est d’autant plus difficile pour ceux qui s’y prêtent quotidiennement…
Bien que les marchés européens, et le CAC 40 notamment, flirtent sur des sommets historiques, le ton semble changer légèrement. Le marché américain débute une phase de consolidation et recule de -2.28% sur le mois de février alors que l’Europe progresse de +1.32%. Cette surperformance de l’Europe sur les US semble s’ancrer de plus en plus. Les investisseurs préférant les actions européennes qui affichent une décote historique alors que le marché américain et ses poids lourds technologiques restent encore chèrement valorisés.
En Asie, la Chine qui a rebondi avec les annonces de la fin du 0-covid a replongé suite à de mauvais indicateurs économiques puis a de nouveau rebondi lorsque ces derniers se sont améliorés. Je ne compte plus les démarrages avortés sur le marché chinois. Il y a autant de redémarrages de la Chine que de vagues de covid ou de vague de sanctions contre la Russie…
L’inflation n’a pas dit son dernier mot…
L’inflation persiste. Après un ralentissement significatif aux États-Unis, elle marque le pas et le même phénomène s’observe en zone euro alors que la baisse a été moins prononcée depuis le pic. Il y a toujours une forme de persistance des phénomènes macroéconomiques. Les mouvements sur la croissance ou l’inflation ont tendance à durer plus longtemps que ce qui est anticipé par le consensus. Je serais tenté de dire que les opérateurs, et les économistes, montrent une forme d’impatience dans les évolutions anticipées.
Le prix des matières premières a pourtant diminué, le prix du fret à chuté et les salaires n’ont pas monté aussi vite pour le moment que l’inflation. Pourquoi diable l’inflation ne diminue-t-elle pas plus vite ?
Il faut comprendre que les mécaniques sont très lentes à se mettre en place. Les hausses de taux des banques centrales vont tout juste commencer à peser sur la demande. Le marché du travail reste extrêmement solide, avec des taux de chômage historiquement bas. Il faut que les emplois non pourvus continuent de se réduire pour que le chômage amorce une remontée.
Les dynamiques en cours vont continuer de faire baisser l’inflation. Nous avons vu le premier palier passer, certainement le plus simple, la baisse des prix des matières premières (même si elles restent encore élevées). Les paliers suivants viendront progressivement et l’inflation va diminuer mais, devrait atteindre un plancher bien plus haut que ce que nous avons connu. Sera-t-il de 3% ? 4% ? Plus ? Impossible à prédire, mais c’est bien le niveau de l’atterrissage que tout le monde essaie de déterminer aujourd’hui. Il dictera le niveau plafond des taux d’intérêt des banques centrales.
Notons au passage une première victime de la hausse des taux : l’immobilier neuf. Les ventes dans le neuf sont en baisse de plus de 30% ! L’immobilier étant un secteur qui draine beaucoup de métiers dans son sillage, cela va peser à la baisse sur les prix. Une mise en garde toutefois, le recul pourrait être retardé si les états soutiennent artificiellement la demande avec des plans d’aides et des boucliers tarifaires à chaque difficulté. Si la demande est maintenue artificiellement par des aides, les prix ne peuvent pas baisser… C’est difficile à admettre, mais dans une économie de marché le fonctionnement et ainsi fait. Les prix baissent si la demande baisse !
Taux d’inflation en Zone Euro :
Taux d’inflation aux US :
La croissance n’a pas dit son dernier mot…
« La récession n’aura pas lieu, Cassandre ! » aurait pu dire Andromaque dans la pièce en 2023. Cela fait des mois et même des trimestres que l’on nous annonce la récession la plus prévue de l’histoire. C’est bien le problème avec les contrariétés pour lesquelles nous sommes trop préparés. Elles peuvent ne jamais poindre !
Pour le moment la croissance résiste. Aussi bien en Europe qu’aux US. La raison est la très bonne tenue des services. Les indicateurs sont repassés en zone d’expansion. Le secteur manufacturier reste en contraction. Ajoutons notre marché du travail à plein régime et vous obtiendrez un brouillard de guerre dans lequel l’ennemi est invisible. La lecture du scénario est ambiguë et il vaut mieux se garder d’essayer d’anticiper ce qui ne peut l’être.
Lorsque les économistes et prévisionnistes sont perdus, ils inventent des concepts. Cela permet sans doute de passer le temps et d’avoir à moitié raison (ou tort comme vous préférez). Nous avons eu les anticipations pour l’atterrissage de l’économie en « hard landing », puis en « soft landing » accrochez-vous maintenant pour le « no-landing ». Les économies resteraient donc en apesanteur sans atterrir. C’est très pratique pour éviter de se prononcer.
Retenons, au-delà de ces critiques faciles, que la lecture du cycle économique est très difficile avec des vents contraires. Il faut donc se préparer à différentes éventualités sans prendre de biais trop certains. Les marchés financiers, qui finalement ont toujours raison, veulent voir une fin heureuse. Nous pensons qu’il faut profiter de l’occasion pour prendre des bénéfices et alléger les portefeuilles. Il y aura bien des séquences d’excès de pessimisme qui reviendront pour prendre le contre-pied.
Il était une fois en Chine
Vous le savez maintenant, nous sommes depuis longtemps positionnés sur le marché chinois. Suffisamment longtemps pour que l’histoire devienne une bonne série en plusieurs saisons. La fin de la politique 0-covid a amorcé un puissant rebond. Nous pensons que le rebond est le début d’une tendance de long terme qui se met en place. Cependant, comme toujours, les choses ne sont pas linéaires ni aussi simples qu’on le voudrait. Le virus, qui continue de se répondre en Chine, pèse sur un redémarrage rapide de l’activité. Les indicateurs économiques, d’abord décevants, ont entraîné une baisse des marchés. Puis quelques indicateurs plus tard, infirmant les précédents, un nouveau rebond s’est amorcé.
Nouveau pétard mouillé ?
L’avenir nous le dira, mais il semblerait que les flux acheteurs se repositionnent sur la Chine. Des annoncent doivent être faites prochainement sur les ambitions de croissance et les plans qui doivent l’accompagner. Cela pourrait constituer un nouveau moteur pour confirmer notre tendance de long terme.
Attention toutefois à ne pas oublier le risque géopolitique qui pèse sur cette zone du monde. Entre soutien à la Russie et ballons-espions à travers le globe, le risque de faux pas pouvant entraîner des contrariétés à court terme est non négligeable.
Sur la longue route, le marché nous semble très porteur et pourrait constituer un relais de croissance pour nos économies. Elles pourraient éviter (une nouvelle fois) la case récession.
Les marchés
Les marchés marquent le pas en février. Ce qui est plutôt normal et sain vu la performance du mois du janvier. Il n’est jamais bon d’aller trop vite en besognes. Les indices européens sont sur des sommets. Il convient de prendre des bénéfices.
Le rebond ayant été violent, beaucoup de gérants et de grosses mains sont sous-investis. Cela écarte le risque d’une forte baisse des marchés à court terme. Les baissent seront probablement achetées régulièrement pour tenter de raccrocher la performance loupée.
Les actions émergentes qui ont baissé sont une opportunité pour reprendre de l’exposition. Les taux sont également bien remontés. Nous préconisons d’alléger le risque actions au profit des obligations de bonne qualité (Investment grade, IG) à maturité moyenne. Le spread de crédit sur les obligations à haut rendement s’est trop resserré. Il n’est plus intéressant de prendre du risque dessus.
*Les performances passées de sont pas un bon indicateur des performances futures.
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